Selon un sondage IFOP d’octobre 2018, 85% des Français se disent inquiets face au réchauffement climatique. Pourtant, le 2 mars dernier, Greenpeace s’est vu refuser l’affichage de sa campagne « Stop au blabla des politiques » dans les couloirs du métro parisien. Comment expliquer des discours politiques verdissants et une inaction politique à la hauteur des enjeux climatiques ?
Tous les candidats politiques ont un petit onglet « écologie » sur leur site officiel de campagne, comme une sorte de « to do list » écologique. André Estevez, physicien et membre de l’Atelier d’écologie politique francilien -réunissant des universitaires, chercheurs, étudiants de toutes les disciplines scientifiques étant inquiets et soucieux d’agir contre les crise climatique et environnementale-, voit cela «plutôt d’un bon œil » même s’il avoue qu’« en regardant les programmes on voit un peu de greenwashing qui s’inscrit dans tous les partis politiques. »
Le discours écologique séduit de plus en plus l’électorat, qu’il soit de droite ou de gauche. Les politiques l’ont bien compris et comptent bien couvrir leurs propositions d’un verni vert. Pour Mei Xin Tambay, membre de la Fondation de l’écologie politique de Paris -considérée d’utilité publique où l’idée est de promouvoir les idées écologiques dans l’espace publique- , « il paraît évident que beaucoup de candidats affichent l’écologie comme priorité mais qu’il n’y ait pas toujours le fond qui correspond à cet affichage, il y a une dose de greenwashing. »
L’écologie politique, des débuts difficiles
En regardant en arrière, en 2001, Olivia Hicks (EELV), première adjointe dans le IIème arrondissement et chargée des affaires scolaires, explique que lorsque le maire appartenant à Europe Écologie les Verts avait voulu introduire le bio dans les écoles, il était confronté à un comité d’opposition, regroupant des élus de droite mais également de gauche, qui considéraient que « le bio était dangereux pour la santé étant donné que les aliments n’étaient pas traités. »
Même si l’écologie ne se réduit pas à l’agriculture biologique, elle n’était pas si bien accueillie en politique ne serait-ce qu’au début des années 2000. Le retournement de situation actuelle dans la construction des discours politiques, avec par exemple le « Make our planet great again » d’Emmanuel Macron ou l’interdiction du plastique à usage unique en 2040, n’échappe pas à la primauté du système économique actuel qu’est le capitalisme. C’est ce que regrette André Estevez qui considère qu’« il faut constituer une réponse sociale politique et une réponse technologique et des sciences naturelles. Pas uniquement technologique comme prôné aujourd’hui. »
Vectrice d’une nouvelle imposition économique
Actuellement les politiques de tous bords prônent l’idée d’une croissance verte ; suite logique du développement durable institué en 2003 en France ou du plan Climat l’année suivante. Pour le politologue Paul Ariès, « il a y a une opération de verdissement d’image, d’opération marketing écologique mais il y a aussi quelque chose qui est en train de se préparer qui est infiniment plus sérieux. Qui est cette adaptation de l’humanité et de la planète aux besoins du capitalisme. » Adepte du principe de décroissance, il voit en ce concept un moyen de transition vers une nouvelle forme de société réellement résiliente, en accord avec les ressources naturelles et la protection de l’environnement.
Le seul parti politique à mentionner ce concept étant les écologistes. « Ça fait 40 ans qu’on dit que notre société doit être décroissante pour pouvoir continuer à vivre bien et mieux pour tous », déclare Emmanuelle Pierre-Marie, tête de liste du XIIème arrondissement. Pour elle, « on a gagné la bataille culturelle, mais on n’est pas près de changer de modèle économique parce qu’on est dans une société industrielle depuis quelques siècles et que l’on nous a toujours dit, et ça c’est la force du capitalisme, on ne peut pas être dans un autre modèle économique, il n’y a que lui qui est viable ». Cette imposition est comparable au TINA économique -there is no alternative- de Thatcher, première ministre libérale britannique dans les années 80, qui est en train de muter vers une nouvelle imposition, qu’est celle de la croissance verte.